Les pages de J. Ghémard - Lettre de son frère Pierre - Pierre Guénard

Les pages diverses et variées de Jacques Ghémard

 
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Lettre de son frère Pierre

 
 

Retour sur mon passé.


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1940 Dessinateur au bureau d'études des usines "Chausson" je m'occupais de la conception des radiateurs d'huile escamotables pour l'aviation de chasse, Morane 406 et Dewoitine 510 et 550.

Juin 40, l'exode. Le BE [bureau d'études] doit être transféré en Haute-Vienne ; je gagne Limoges par mes propres moyens (en bicyclette) et me retrouve dans une usine de porcelaine, les pieds dans le kaolin, couchant sur des sacs vides, attendant l'arrivée du matériel et des archives. Hélas, comme soeur Anne nous ne vîmes rien venir, l'intendance était défaillante et nous subsistions tant bien que mal.

Un collègue du BE plus âgé que moi (un vieux de 35 ans) me décide alors de l'accompagner sur la côte où nous pensions pouvoir embarquer pour le Canada, selon un tuyau sûr.

Voyage mouvementé mais à notre arrivée à La Palice, le Foucault, sur lequel nous pensions partir, brûlait dans le port. Départ avec un bateau de pêche pour l'ile de Ré. Première nuit à l'établissement pénitentiaire de St Martin de Ré ou l'autorité militaire devait nous avoir un passage sur le Champlain. Manque de chance le bateau a été bombardé et n'est jamais arrivé à quai. De nouveau inactifs, nous avons gagné "La Tricherie" un petit village non loin du phare des Baleines.

Quelques jours de désoeuvrement, hormis la pêche à pied, puis retour vers Paris afin d'avoir des nouvelles de nos familles. Voyage de mouvementé et des ruses de sioux pour passer la fameuse ligne de démarcation qui venait d'être instituée [plus probablement des barrages que la ligne qui passait plus au sud]. A notre arrivée a Puteaux, la famille était rentrée depuis quelques semaines, inquiète sur mon sort.

Quelques mois de retour à la terre chez un soi-disant cousin, agriculteur à Morangis, juste de quoi assurer quelques réserves de nourriture pour la maisonnée.


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1941- à nouveau au bureau d'études

1942 - Difficile année que celle de mes vingt ans. J'ai le sentiment que la vie m'a volé ma jeunesse

Premières mesures d'incitation au départ en Allemagne sous le prétexte de la relève des prisonniers. Une véritable escroquerie morale, puis le STO (service du travail obligatoire)

Pour échapper au départ, je décide d'un engagement dans l'armée d'armistice dans laquelle restait la Royale en Méditerrané et de l'aviation en Zone libre

Concours d'entrée aux EOA de Salon de Provence et affectation à la base de Toulouse Francazal. J'ai la feuille de route en poche quand, le 11 Novembre 1942, les troupes de l'axe envahissent la zone dite libre. L'armée d'armistice est dissoute et je me retrouve démobilisé avant d'avoir rejoint mon unité.


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Dossier pour la Légion d'Honneur de Philémon Jules Soubeyrand (1893-1975)

Lors des formalités de démobilisation, je rencontre le colonel Soubeyrand à qui je parle de mes craintes pour l'avenir et aussi d'une tentative avortée de départ pour l'Angleterre, l'appareil n'ayant pas pu, de nuit, trouver le terrain de fortune près de Sées, dans l'Orne. Ce colonel formait alors, dans le cadre des conventions d'armistice, quelques compagnies de génie, sapeurs de transmissions, sapeurs mineurs, sapeurs de chemin de fer. C'est dans une de ces compagnies que j'ai échoué fin décembre 1942. (Nous étions des soldats sans armes ou des civils en tenue militaire) Nous étions chargés reconstruire des ponts démolis en 1940, en principe uniquement des ouvrage pour les civils, bien qu'à ma connaissance rien ne distingue un pont "civil" d'un pont "militaire".

Mais là aussi les menaces de départ pour l'Allemagne de faisaient de plus en plus pressantes.

A force d'astuces et de magouilles, passant de l'emploi de bucheron à celui de pontonnier, puis de secrétaire, de responsable d'intendance, j'ai réussi à rester dans les Ardennes


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Au printemps 1944, le commandement nous a dirigé, à petites étapes, vers la côte normande sous prétexte de remise en état de voies ferrées ou de petits ponts dans le fond des campagnes. En Juin 1944 nous étions, sinon aux premières loges, tout au moins au premier balcon. Peu de temps après, notre train-parc a été pris pour cible et mon wagon d'ordinaire où j'avais à la fois des réserves de vivres, mon bureau et ma chambre s'est trouve transformé en simple plateforme projetée assez loin des rails. J'avais eu la chance de sauter du wagon dès le début de l'attaque et c'est caché dans un élément de tranchée que j'ai attendu, avec le trouillomètre à zéro, la fin du bombardement.

J'ai eu beaucoup de chance ce jour là, ma petite chienne étant plus gravement touchée que moi


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Puis nous sommes revenus vers Paris, après avoir été rattachés à la division Patton. Notre emploi à cette époque, faire du déminage et de débombage. Métier à risques disent certains. Mais nous avions vingt ans, l'âge où l'on se croit indestructible. Il me reste peu de camarades de cette époque. Un d'entre eux a fini sa carrière comme général à la chefferie du génie à Versailles, un autre, un as en explosifs, devenu depuis presque de la famille puisque je suis le parrain d'un de ses petits fils, termine ses jours au soleil d'Avignon. Je crois encore maintenant qu'il était beaucoup plus inconscient que courageux. Hélas, des amis de ces années là, beaucoup ont disparu et nous nous efforçons d'oublier ces temps là. Il y bien longtemps que je n'ai pas parlé de cette période. Je dois avouer que rarement des gens m'ont demande quelle a été ma vie lorsque j'avais 20 ans. Même Jean-Michel ou mon petit fils ne m'ont interrogé à ce sujet. Pour moi comme pour ta Maman ou pour Jean, nous n'avons voulu nous souvenir que des années heureuses.

A l'occasion d'un repos à Tours, en la fin Décembre 1944, j'ai eu l'opportunité de retrouver la vie civile et j'ai saisi cette occasion.

Ni héros, ni dégonflé, j'ai eu la chance de sortir vivant et sans séquelles de mon passage dans l'armée. c'est tout.

J'ai poliment décliné l'offre de continuer dans l'armée où même d'entrer avec un bon grade dans la Gendarmerie. J'avais vu tellement d'imbéciles exercer des commandements que je ne risquais pas de regretter mon désengagement.

Quand un soldat s'en va en guerre il a ... dans sa musette un képi d'Maréchal
Quand un soldat revient de guerre il a ... simplement eu d'la veine et puis c'est tout


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J'ai relu une des lettres que Jeannette avait gardé. Il y a tellement de fautes d'orthographe et de fautes de syntaxe que je n'ai pas eu le courage de relire les autres

A ta question : qui vous a rapprochés Jeannette et toi ? La réponse est simple : avec Jean, nous étions les trois fruits d'un même arbre. Point n'était besoin de longues conversations pour nous sentir proches les uns des autres. Si ma soeur a été si discrète sur ma jeunesse c'est qu'elle ignorait ce qui se passait vraiment, le courrier, à cette époque, n'étant pas totalement confidentiel

Il apparait, d'autre part, que chacun d'entre nous occulte, sans doute inconsciemment, les périodes malheureuses du fait des évènements, guerres ou décès de proches, pour n'évoquer que les moments heureux. Avec ta Maman, nous avions la complicité d'une soeur pour son petit frère


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Ce qui nous éloignait ? Je répondrai par une boutade: 30 km. Et 30 km en région Parisienne représentent certains jours, autre chose qu'une promenade de sauté. Et puis aussi le métier qui mange une grande partie de notre temps et quand vient la retraite la fatigue et une certaine forme d'égoïsme propre à tous les vieux. De plus une certaine retenue propre à toute la famille

Mais de tout cela, j'aimerai que nous en reparlions lors d'une prochaine rencontre

Je me suis laissé aller a une incontinence épistolaire et vous demande de bien vouloir me pardonner

Si vous n'avez pas en la patience de me lire jusqu'au bout, ne regrettez rien, 90% de ma prose étant sans intérêt

Je vous embrasse
Pierre

Petit bémol

Contrairement à ce que Pierre semblait penser, le déplacement vers l'ouest de sa compagnie, ne s'est pas effectué subrepticement pour rejoindre les alliés mais plutôt en suivant les souhaits des Allemands et pour leur servir, malgré les protestations du commandement français de ces unités de génie

J'avais sauvegardé ce document que je ne retrouve plus sur le Web :


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